Ecrire le corps en littérature.

Dans la littérature, l'écriture du corps demande généralement au lecteur d'utiliser son imagination. En effet, les dessins ou photos suppriment l'expérience de l'imagination fournissant au lecteur la conception du mot description de quelqu'un d'autre et lui dérobent une relation personnelle avec le texte. C'est pourquoi, en littérature textuelle pure on peut expérimenter une double forme d'action. Il y a d'abord les mots de l'auteur qui décrivent le corps et les diverses lectures de ce corps par les autres personnages. Ensuite, le lecteur, par l'entremise de son imagination écrit une réaction tripartite : le corps représenté, les réactions par les différents personnages et les propres perceptions du lecteur sur ce qui est présenté. Ces derniers peuvent être parallèles aux intentions de l'auteur ou être les propres créations du lecteur basées sur son vécu, son expérience, ses préférences, et tout ce qui fait du lecteur ce qu'il est, ceci provoquant de sa part l'écriture d'autres corps d'une manière personnelle et particulière. Les histoires d'Edgar Allan Poe fournissent de nombreuses opportunités pour écrire le corps en littérature notamment dans l'histoire d'un amour perdu : Ligeia

Poe : un exemple.
Dans le second paragraphe de Ligeia, le narrateur écrit à la fois le corps littéral et figuré de Ligeia, fournissant au lecteur les caractéristiques physiques génétiquement déterminées et ses impressions au sujet de ces traits - en d'autres termes , comment le narrateur écrit le corps de Ligeia. Le narrateur décrit Ligeia " d'une grande taille, un peu mince ", une pure représentation physique qui pour lui représente sa " majesté, l'aisance tranquille de sa démarche ". Ces deux phrases présentent clairement la juxtaposition entre l'apparence physique d'une personne et l'interprétation de cette apparence écrite par une autre personne. Le narrateur décrit d'autres attributs physiques comme le merveilleux visage de Ligeia, une observation qui est d'une part une possible certitude physique et d'autre part l'interprétation de son attractivité. Le narrateur plus loin décrit Ligeia lorsqu'il dit que " bien que je visse que les traits de Ligeia n'étaient pas d'une régularité classique, -- quoique je sentisse que sa beauté était véritablement exquise ". Evidemment, cet homme malade d'amour observe difficilement la forme physique de Ligeia sans écrire également ses impressions personnelles de ce qu'il voit. Il agit de même avec son front, sa bouche, et particulièrement ses cheveux, dont la couleur est noire, mais qui pour lui est " hyacinthe " un condensé de tout ce qu'il a écrit au sujet de ses cheveux.

Poe : un second exemple.
La description que fait le narrateur des yeux de Ligeia dans les paragraphes trois, quatre et cinq fournit un autre bon exemple d'écriture du corps. Les yeux sont noirs et peut être plus larges que des yeux " normaux " .Quelques autres attributs peuvent être ajoutés à cette description, ceci dépendant d'un point de vue, de l'expérience personnelle, etc… Pour le narrateur, cependant, ces yeux contiennent une " étrangeté " qui n'est pas apparente dans son apparence physique, mais dans " l'expression " de ces yeux. Cette écriture du corps nous dit deux choses importantes à propos du narrateur. D'abord, il ne peut pas voir Ligeia sans écrire son corps, ensuite, son écriture du corps de Ligeia commence par dire plus de choses au sujet de la conduite du narrateur que de celle de Ligeia. Le narrateur reconnaît la beauté des yeux de Ligeia, mais ne peut pas sonder leur signification pour lui-même. Dans le quatrième paragraphe, il s'engage dans l'  " ardente analyse des yeux de Ligeia " et "  cependant, [il] n'en ai pas moins incapable de définir ce sentiment, de l'analyser ou même d'en avoir une perception nette ". Le narrateur est dès à présent chancelant dans sa propre vie. Il admet au paragraphe cinq que "  je ne pouvais évaluer cette passion que par la miraculeuse expansion de ces yeux qui me ravissaient et m'effrayaient en même temps. " Le narrateur décrit clairement le corps de Ligeia comme le centre des émotions positives et négatives qui torturent son âme.

Poe : une transition.
Le changement du narrateur dans son attitude et sa prise dans la réalité sont réfléchis dans la façon dont il décrit le corps de Ligeia dans les paragraphes sept et quinze. Il voit à la fois Ligeia et Lady Rowena tomber malade et la combinaison de caractéristiques physiques avec son imagination surmenée lorsqu'il écrit ses souvenirs des corps sautent les pages. (…)